Alors que je soufflais sur ma 6e bougie, mes parents ont pris une grande décision, soit poursuivre leur route chacun dans leur sentier. Je me rappelle la peine de mes parents, au-delà de la mienne…
À l’époque, la garde partagée n’était pas la solution. Nous avions un « papa de fins de semaine». J’ai alors grandi avec ma mère qui était mon phare, en sentant toujours un vide du côté paternel. Je fréquentais peu son chemin; il ne connaissait pas le mien. Un jour, un homme pour qui j’ai beaucoup de respect m’a dit ceci: « Tu sais Karine, je n’ai pas connu personnellement ton père, mais j’ai le sentiment qu’il vous aimait assez ton frère et toi pour s’éloigner. » Ces paroles ont eu l’effet d’un coup de canon, celui qui résonne partout dans notre corps … Mon père m’aimait assez pour s’éloigner ?
Mon père était prisonnier de l’alcool qui lui avait volé l’estime et l’amour propre. La boisson paralysait ses émotions qui le faisaient souffrir… Une seule émotion trouvait encore la force de percer son cœur meurtri: l’amour! Il était conscient qu’il était incapable de remplir le contrat parental. Il nous aimait comme seul un père peut aimer. Il ne nous l’a jamais dit, et longtemps j’ai pleuré l’absence de ces mots. Mais aujourd’hui, je sais que son silence était sa façon de dire « Je t’aime ». Il nous a confiés à notre mère. Il la connaissait assez pour savoir qu’elle allait ouvrir des nouveaux sentiers pour nous. Il rêvait d’une vie meilleure pour ses enfants et c’est en s’éloignant qu’il y arriverait parce qu’il n’avait plus la force de quitter son chemin épineux…Je l’ai vécu comme un abandon, alors qu’il nous aimait assez pour s’infliger l’éloignement de ses enfants.
Alors que je soufflais sur ma 6e bougie, mes parents ont décidé de mettre de côté leur amour, qui ne s’est jamais éteint. J’ai vu dans les yeux de ma mère, la lueur de cet amour quand on a accompagné notre père vers son dernier repos 15 ans après leur séparation. Celle qui a injustement porté le blâme pour la solitude et la tristesse de mon père, l’aura aimé jusqu’à la fin. J’ai senti sa peine, au-delà de la mienne…
Mon histoire n’est pas celle d’une famille traditionnelle, mais l’amour est au cœur de cette histoire.
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