Le soir où j’ai flanché

Par Marie-Anik Shoiry

En juin 2018, j’ai fêté mes 38 ans. Le jour de mon anniversaire, j’ai partagé dans ma story Instagram les photos d’une femme pour qui tout semble bien aller. Une photo de mes espadrilles rose fluo après mon 5 KM de course. Une autre de moi qui savoure un délicieux café latte lors de mon déjeuner au restaurant. Quelques clichés festifs de mon souper en famille chez mon père.

Ce que je n’ai pas montré, c’est le moment où j’ai flanché. Celui où je me suis effondrée. Devant les regards un peu incrédules des membres de ma famille. De mes enfants.

Depuis quelques mois, ça allait plus ou moins bien. Je me remettais tranquillement d’une commotion cérébrale. J’en avais énormément sur les épaules. Mon conjoint était régulièrement à l’extérieur du pays pour son travail. J’occupais le poste de directrice d’un service juridique qui m’en demandait beaucoup. Je voulais écrire et investir du temps dans le développement mon blogue. J’avais initié le projet communautaire « Vide ta sacoche » pour aider les femmes dans le besoin. Je gérais la maisonnée à vitesse grand V et je tentais d’être présente et disponible pour mes trois enfants. Ah oui, et je voulais m’entraîner aussi.

Comme l’a si bien dit Michelle Obama lors d’une conférence donnée à Québec à laquelle j’ai eu la chance d’assister : « You cannot have it all. »

Tu ne peux pas tout avoir.

Moi, je voulais tout avoir et tout réussir et c’était simplement impossible.

Au travail, même si j’adorais mes collègues et l’entreprise pour laquelle je travaillais, j’avais le sentiment que je n’étais pas tout à fait sur mon « X ». Que je ne m’accomplissais pas pleinement.

Le soir de ma fête, après avoir soufflé les bougies de mon gâteau, je m’attendais à recevoir un certificat- cadeau chez Apple, pour m’acheter un nouveau iPad.

Parce que c’est ça que j’avais demandé.

Ma famille a préféré m’offrir un séjour de trois nuits au Spa Eastman dans les Cantons de l’Est. Ils avaient même déjà réservé ma chambre et je partais deux jours plus tard.

Sur le coup, j’étais fâchée, voire un peu insultée.

« J’ai vraiment pas besoin d’aller toute seule dans un spa! J’voulais un nouveau iPad moi! »

Ma fille Juliette m’a alors dit, la mine basse : « T’es pas contente Maman? »

Et là, j’ai éclaté en sanglots. La fatigue, un peu de vin, ma famille qui me passe le message que je dois prendre soin de moi, le vase a juste débordé.

Alors je suis partie à Eastman. Toute seule avec moi-même. La petite voix au fond de moi me disait que c’était la bonne chose à faire. Je devais bien me l’admettre, j’étais une humaine au bout du rouleau qui avait besoin de temps pour elle. J’avais besoin de me retrouver, de me ressourcer, de faire le point sur ma vie.

J’ai passé trois jours habillée en mou. J’ai participé à tous les ateliers de bien-être qui étaient inclus dans mon forfait. Du yoga, de la méditation, une session d’écriture qui portait sur nos rêves. Je me suis même laissée aller dans un cours de yoga du rire. Et j’ai vraiment ri. J’ai marché en pleine nature dans de magnifiques sentiers. J’ai lu des livres inspirants. Je me suis endormie au soleil dans un hamac. Je me suis fait masser. J’ai bu des litres d’infusions aux nombreuses vertus. J’ai mis sur papier mes pensées. Je me suis arrêtée.

J’ai pris une pause de ce rythme de vie effréné dans lequel je ne me retrouvais plus.

Ma famille m’avait offert le plus beau des cadeaux.

Du temps pour moi.

Ce séjour ressourçant a été l’un des points tournants de ce passage vers une nouvelle étape de ma vie.

Pour m’aider dans cet important cheminement, j’ai eu le support très précieux de mes proches. Je suis également allée consulter.

Accepter de recevoir l’aide d’un professionnel a été extrêmement bénéfique. La guérison de certaines blessures, le syndrome de l’imposteur, la peur du jugement, la gestion des apparences, la confiance en moi, le stress financier… On s’entend, j’avais plusieurs défis à surmonter, d’enjeux à analyser et j’avais besoin d’un accompagnement pour y arriver.

En janvier 2019, après plus de 13 ans de pratique comme avocate et quelques années dans un rôle de gestion, j’ai finalement pris la décision de démissionner de mon emploi. J’ai fait un virage à 180 degrés pour me lancer à mon compte dans le monde des arts et des communications et pour investir davantage de temps dans mon projet communautaire pour les femmes dans le besoin. Avec l’appui de mon conjoint, j’ai choisi de plonger dans cette nouvelle aventure, pour m’accomplir autrement et pleinement. J’ai pris le risque d’une vie différente, davantage centrée sur mes valeurs et sur mes rêves. J’ai choisi de m’épanouir dans ma mission de vie qui est de faire du bien.

Et surtout, j’ai fait le choix de prendre soin de moi.

C’est sûrement l’une des décisions les plus difficiles que j’ai eu à prendre dans ma vie. Mais je n’ai aucun regret, bien au contraire. Je suis fière de moi.

Parce que rien n’est une finalité.

C’est simplement une nouvelle étape. Pour mieux avancer.

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